C’est
un principe que les institutions américaines ne pourraient acceptées. Après
s’être battues pour obtenir une indépendance chèrement acquise aux prix de
milliers de morts face au redoutable empire anglais, les Etats-uniens ne
voudraient jamais d’un système monarchique ou dictatorial.
Et
pourtant !
Vous
ne le savez peut-être pas, mais les Etats-Unis ont eu un empereur ! Ce ne
fut pas une idée fugace ou une invention à but humoristique, Joshua Abraham
Norton fut Empereur des Etats-Unis et protecteur du Mexique de 1859 à 1880.
Mais
quelle est cette histoire farfelue ? Il ne me viendrait
pas à l’idée de vous raconter des salades ! Elle est bien sérieuse. A ceci
près que l’empereur Norton Ier, s’est posé lui-même la couronne sur la tête.
Plus fort que Napoléon, qui avait besoin du
plébiscite des Français, Norton a décidé, par sa seule et unique volonté, de s’autoproclamer
Empereur des Etats-Unis.
Mais
comment ont réagi les Américains ? Ils ont dû s’offusquer, le dénoncer, lui
couper la tête… Que nenni ! Il fut aimé ! Vous ne comprenez
plus : comment un état construit sur la philosophie des Lumières, porteuse
de valeurs républicaines et égalitaires, a-t-il pu accepter une telle hérésie
politique ? D’autant qu’il a tout de même régner 21 ans !
Il
faut commencer par ses débuts. Joshua était un brave homme, commerçant et homme
d’affaire de son état. Ce fils d’expatrié anglais, avait quitté l’Afrique du
Sud pour la jeune et riche Amérique où il espérait, comme tant d’autres qui ont
entreprit ce périlleux voyage, faire fortune. Il pose ses valises à San
Francisco. D’abord chanceux, il se fait un petit pécule avant de tout perdre
après avoir tout misé sur un malheureux bateau de riz ! Le voilà ruiné et
seul puisque la justice entérine sa faillite.
C’est
l’épisode de trop !
Il
vit une injustice et l’état est trop corrompu pour prendre en considération son
cas personnel. Il se saisit alors sa plus belle plume, la trempe dans l’encre
et écrit plusieurs dizaines de feuillets aux journaux où lui, Joshua Abraham
Norton s’autoproclame « Empereur de ces Etats-Unis » (littéralement
en anglais Emperor of These United
States) et réclame obéissance à ses nouveaux sujets et autorité sur les
gouvernements en place. Ses feuillets resteront lettres mortes et Norton Ier va
commencer son long règne dans une relative indifférence.
Relative ?
Oui, car si l’Empereur réalise de nombreux décrets qui n’auront aucune
incidence, il devient néanmoins une célébrité dans la ville qui va devenir son
domaine. Ainsi, Louis XIV avait le domaine royal de Versailles, Norton Ier a eu
San Francisco. Tous les jours, à l’instar de notre Grand Louis, l’Empereur
avait un emploi du temps chargé et une véritable étiquette. Il inspectait les
rues de la ville en vélo ou à pied et tout le monde lui montrait du respect à son passage. Norton
pouvait même s’offrir le luxe de battre monnaie puisqu’il payait ses
restaurants et autres condiments avec des billets au porteur que tout le monde
acceptait de bonne grâce. Jamais un théâtre ne commençait son spectacle sans
que l’Empereur ne soit présent à son balcon.
Comment
expliquer un tel succès ? Probablement que la personne attachante qu’était
devenu Joshua, alias Norton Ier, lui avait attiré une grande sympathie. Tout le
monde savait que son cas relevait de la psychiatrie mais il ne faisait pas de
mal. Au contraire : il s’enquérait de la vie de ses sujets et les décrets
impériaux qu’il écrivait étaient souvent poussés par la volonté de se battre
contre l’autoritarisme et les abus de la politique politicienne.
Un
jour, un jeune policier l’arrête ! Surement nouveau et pas mis au courant,
il tentait de le faire soigner de force. Consternation de la population, des
médias et de la police elle-même. Il est aussitôt relâché. Maltraité un roi
aurait valu la mort à se policier. Norton se montre magnanime et lui offre un
Pardon Impérial. Par la suite, les officiers de police salueront sa majesté
impériale à son passage comme pour montrer leur gratitude devant tant de
bonté !
On
doit aussi à Norton Ier des réalisations et des exploits. Il est à l’origine du
pont reliant Oakland et San Francisco (malheureusement construit après sa mort)
qu’il réclamait dans de nombreux décrets. Enfin, il fait cesser une révolte
populaire en barrant la route des deux cortèges qui allaient en venir aux mains
et aux armes ! Enfin, il eu une importante liaison épistolaire avec la
reine Victoria, her-self !
Norton
tombe dans la rue le 8 janvier 1880. Les secours arrivent… il est trop
tard ! « Le roi est mort » titre les journaux en français dans
le texte le lendemain. Son corbillard, financé par la population sera suivi par
30 000 personnes. Le lendemain de son inhumation, une éclipse solaire totale
obscurcie la ville. Il repose aujourd’hui à l’extérieure de la ville de San
Francisco qui fut pendant 21 ans son empire.
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